Que retenir de la Convention Citoyenne pour le Climat ?

24 janvier 2023
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Si les dispositifs de participation citoyenne se multiplient partout en France, en Europe et dans le monde, notamment à l’échelle locale où ces derniers suscitent un engouement certain, la Convention Citoyenne pour le Climat représente un exercice inédit. Ces démarches ne se résument plus seulement à de la consultation réglementaire, mais vont répondre à la volonté des citoyens de devenir des acteurs de sujets qui les concernent.

C’est en effet dans un contexte de défiance généralisée des citoyens envers les élus et les institutions que s’est développée la participation citoyenne en France, organisée par une multiplicité d’acteurs, et qu’a notamment été organisée la première Convention Citoyenne pour le Climat (CCC), bien avant que ne soit envisagée la Convention Citoyenne sur la fin de vie initiée fin de cette année 2022.

Ce dispositif inédit, en plus de travailler dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique, s’est pourvu d’un objectif de refonte de la démocratie institutionnelle française. Qu’en reste-t-il aujourd’hui ?

En quoi consiste la Convention citoyenne pour le climat ?

Dès 2018, le mouvement des Gilets-Jaunes permet de donner davantage de résonance aux demandes de « démocratie directe », d’un meilleur contrôle des décisions parlementaires ainsi que la création d’une « assemblée citoyenne tirée au sort, représentative de la société, chargée de faire des propositions donnant lieu à un référendum à choix multiples ». Afin d’y répondre, à l’issue du Grand Débat National – outil consultatif des maires de France – est décidée l’installation d’une Convention Citoyenne pour le Climat et d’un Conseil de défense écologique pour répondre à l’« état d’urgence climatique ».

En quoi consiste la convention citoyenne pour le climat

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Cet exercice inédit de participation citoyenne doit être à l’origine de propositions capables, dans un esprit de justice sociale, de diminuer de 40% minimum les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 et ainsi minimiser les effets du réchauffement climatique. Les mesures proposées à l’issue de ce dispositif doivent donc répondre aux quatre grands principes suivants :
  • Placer l’écologie au cœur du projet économique ;
  • Concilier pleinement justice sociale et transition écologique ;
  • Réussir l’aménagement du territoire français ;
  • Responsabiliser chacun.

Qui sont les 150 citoyens tirés au sort ?

Cette Convention Citoyenne pour le Climat, organisée par le CESE, permet pour la première fois le rassemblement d’un panel de 150 citoyens tiré au sort, représentatif de la diversité des citoyens et citoyennes françaises, et la participation de citoyens directement impliqués dans le travail préparatoire de la loi. L’engagement du président de la République est conséquent : le travail issu de la Convention devra être soumis « sans filtre » au référendum, vote du Parlement, ou à application réglementaire directe.

En peu de temps, le panel citoyen s’est vu attribuer une mission importante et large de lutte contre le réchauffement climatique, malgré des niveaux de connaissance et d’adhésion hétérogènes sur la question. Durant 9 mois (Octobre 2019 – Juin 2020), plusieurs sessions de formations, de rencontres avec des experts, de débats, d’explorations thématiques, d’ateliers de travail et de votes sont organisées pour le résultat final de 149 propositions adoptées par la Convention sur 400 heures de travail.

Qui sont les 150 citoyens tirés au sort

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De nombreux acteurs ont ainsi pris part et garanti la bonne tenue de la Convention, et ont permis la richesse des débats :

  • Un comité de gouvernance – animé par le CESE et composé de 12 experts (climat, démocratie participative, économie et social), chargés de l’élaboration du programme de travail et de sa bonne mise en œuvre ;
  • Des experts auditionnés, chargés d’intervenir dans les différents groupes de travail afin de former de manière neutre et « sans orientation » les citoyens tirés au sort sur les différents priorisés par le CESE ;
  • Un collège de garants composé de Cyril Dion, Anne Frago et Michèle Kadi, chargés de veiller au respect de l’indépendance et de déontologie du processus ;
  • Un groupe d’appui, composé de 14 experts chargés de conseiller les citoyens sur les sujets à explorer et dans l’élaboration des propositions de mesures ;
  • Un comité légistique, composé de juristes dont la mission était de fournir un soutien aux citoyens pour formuler et retranscrire les mesures en bonne et due forme.

Ces multiples acteurs ont permis au panel citoyen de se qualifier et de comprendre les enjeux de la Convention (deux fondamentaux de la participation citoyenne), tout en garantissant l’organisation d’un cadre de travail sécurisé capable de laisser les multiples opinions s’exprimer en confiance. Le débat et l’engagement citoyen ont ainsi été centraux pour trouver des solutions qui concernent les citoyens au quotidien face à la crise climatique.

Une plateforme de contribution publique a également été organisée, accessible en ligne, permettant à tout citoyen ou organisation déclarée d’adresser aux groupes thématiques des propositions, renforçant le foisonnement d’idées et d’opinions que doit constituer un tel dispositif de participation citoyenne.

Quelles sont les propositions issues de la Convention Citoyenne pour le Climat ?

Les ambitions conséquentes de la Convention ont permis à 149 propositions formulées par les citoyens tirés au sort de voir le jour, autour de 5 thématiques :
  • Alimentation et agriculture ;
  • Habitat et logements ;
  • Emploi et industrie ;
  • Aménagement et transports ;
  • Modes de vies et de consommation.
Ces mesures, votées lors de la dernière session en Juin 2020, ont été directement soumises au gouvernement. Trois propositions doivent quant à elles être soumises à référendum.

Le 29 Juin 2020, alors qu’il reçoit les 150 tirés au sort, le Président de la République déclare retenir 146devant être soumises au Parlement sans filtredes 149 propositions en excluant de :

  • Limiter la vitesse à 110 kilomètres à l’heure sur l’autoroute ;
  • Taxer à 4% les dividendes supérieurs à 10 millions d’euros afin de financer la transition écologique pour éviter de freiner les investissements ;
  • Réécrire le préambule de la Constitution pour « placer l’environnement au-dessus des autres valeurs fondamentales » de la République.

Quel bilan faire de la Convention Citoyenne pour le Climat ?

Qu’en est-il vraiment ? Aujourd’hui, seules 10% des propositions initiales constituent le projet de loi issu de la Convention Citoyenne pour le Climat, malgré les engagements initiaux, sous motif de rendre la mise en œuvre des mesures la plus efficace et rapide possible. Seules 15 mesures ont bénéficié du « sans filtre » promis par l’Exécutif.

Pour autant, cette Convention Citoyenne pour le Climat a permis de faire connaître en France ce nouveau dispositif de participation citoyenne, et donné des idées à plusieurs collectivités afin de prendre des mesures en lien avec les citoyens et leur vécu au quotidien. Depuis, ce sont notamment l’Occitanie, Grenoble, Nantes ou encore de plus petites collectivités qui ont organisé leur propre Convention Citoyenne locale, permettant à la fois de consulter et faire participer les citoyens à la transformation de leur territoire. Nationalement, il faut encore attendre de voir ce que donnera la Convention Citoyenne sur la fin de vie.